Erwann Menthéour: l'interview – Coach Magazine France

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© Emmanuel Bournot

Personne n’est à l’abri d’un « coup de mou ». Ni vous, ni moi, ni les « people ». Ancien cycliste professionnel devenu journaliste, écrivain et fondateur de la méthode Fitnext et du site de coaching en ligne fitnext.com, Erwann Menthéour a connu une année 2018 difficile, qui l’a vu perdre ses repères, prendre du poids et sombrer dans la dépression. Une épreuve dont il a su se relever, pour revenir plus affûté et déterminé que jamais.

Tomber, se relever…

Sur la page d’accueil de son site de coaching, Erwann Menthéour apparaît détendu, souriant. Pas de gros biceps gonflés, de pectoraux saillants, d’abdos découpés. Pourtant, sous le T-shirt, la « bête » est impressionnante, bâtie comme un taureau de combat. Les photographies réalisées fin juin par Emmanuel Bournot montrent un corps taillé, plein, une puissance à l’état brut que l’on imagine indestructible. Comment croire qu’il s’agit là d’une façade qui vient juste d’être « ravalée » et qui six mois plus tôt n’avait pas du tout la même physionomie ? Lorsque je rejoins Erwann chez lui, dans son appartement parisien, cette façade vole en éclats. Heureux de remonter la pente, il parle sans détour des épreuves qu’il vient de traverser, de la façon dont il s’est battu et des nouveaux challenges qui le motivent.

A 46 ans, tu affiches une forme physique éclatante. Pourtant, l’an dernier, à la même époque, tu pesais 15kg de plus et tu étais au fond du trou. Sans rentrer dans les détails, que s’est-il passé ?

Être coach ne vous immunise pas contre les aléas de la vie ni de ses tourments. Depuis l’arrêt de ma carrière cycliste pro, fin 1997, plusieurs des anciens potes de ma génération se sont suicidés ou sont morts de maladie autour de moi. En 2013, j’ai perdu un de mes meilleurs copains: Philippe Gaumont. Ca a été un vrai choc de le voir allongé comme un croisé sur son lit de mort. Puis c’est mon grand frère Pierre-Henri, mon idole, qui s’est éteint en 2014, littéralement bouffé par un cancer. La mort rôdait autour de moi… je pouvais la sentir et je crois qu’inconsciemment, j’ai dû mettre un mécanisme de compensation dans ma tête pour pouvoir supporter cette douleur incandescente au milieu de ma poitrine. Chaque nuit je me repassais le film de ma vie et des jours heureux avec ceux que j’avais perdus. Ce qui était très dur, c’est que tout allait bien en apparence. J’avais un couple solide, une femme extraordinaire, mes deux filles me comblaient, ma société Fitnext se développait remarquablement, j’étais sur la quotidienne sur France 2 avec Stéphane Bern, et chacun de mes livres était un best-seller. Je ne pouvais pas me plaindre, je n’en avais pas le droit. Mais si vous jetez chaque jour les poubelles à la cave en vous imaginant que cela ne vous rattrapera jamais, vous vous fourvoyez. Un jour viendra où la cave sera remplie de détritus et vous ne pourrez plus rien y ajouter ! C’est pourtant ce que j’ai fait consciencieusement pendant quatre ans. A force de repousser le moment où je devais affronter le problème, ça m’a pété à la gueule. Ma femme m’a quitté en 2016 et, ça me fait mal de le reconnaître mais elle a eu raison, je devenais vraiment très con… Était venu le temps d’affronter le mal.

Il est paradoxal d’être le patron d’une entreprise prônant la santé et le bien-être par le sport et la nutrition et d’être « rattrapé » par la dépression… Tout le monde peut donc « plonger » ? 

Oui, vraiment, je crois que personne n’est à l’abri ! Mais il ne faut pas tout « pathologiser », la souffrance fait partie de la vie, il faut juste savoir la rendre motrice. On veut se raconter que la vie est cool, et les réseaux sociaux sont devenus pour ça très culpabilisants, mais rien n’est plus faux. C’est souvent inconfortable de vivre. Et c’est ça aussi qui rend nos existences passionnantes. On ne doit pas culpabiliser d’aller mal, on ne doit pas chercher à le fuir. Bien sûr qu’on se passerait volontiers des tuiles qui nous tombent sur la gueule, mais regardons les choses en face, la vie est faite aussi de ça. Ca vous contraint à l’humilité, ça vous donne de l’empathie, de la bienveillance et de la compréhension (je précise qu’on n’est évidemment pas obligé de sombrer pour avoir de l’empathie!). Et on peut alors faire des moments de dépression le lieu de métamorphoses inattendues. Faisons de tout ce qui nous contrarie un alcool, un moteur: on peut faire feu de tout au fond. En ce qui me concerne, les épreuves n’allaient pas s’arrêter là. Au départ de Kristel, c’est tout mon monde qui s’est écroulé. J’ai essayé de faire face comme je pouvais mais mon armure était fissurée. Ce fut ensuite au tour de Fitnext d’avoir des problèmes fin 2017, de très gros problèmes liées à mes équipes techniques lors du lancement d’une nouvelle application.

J’ai eu un dernier sursaut d’orgueil: j’ai changé les équipes techniques et recruté un nouvel associé pour diriger la société avec moi. Nous étions alors à l’été 2018. Et c’est là que j’ai vraiment sombré… Je mangeais moins bien que d’habitude, je picolais et, surtout, je n’arrivais plus à consacrer sérieusement du temps à m’entraîner… Ma déprime avait fait son chemin depuis quatre ans, ses graines s’étaient transformées en fruits et je n’arrivais plis à trouver de ressources… En janvier 2019, j’ai dû faire face au décès d’un de mes très proches. Je suis descendu à Brest pour ses obsèques, et Margaux, ma grande fille, m’a appris que Lou, ma petite dernière, 11 ans, ne supportait plus de me voir à terre, qu’elle préférait désormais rester avec sa mère. Je ne m’y attendais pas, j’étais sonné, terrassé…

D’où est venu le déclic qui t’a décidé à te relever ? 

Lou a accepté de me voir et m’a expliqué qu’elle ne reviendrait que lorsque je serais redevenu moi-même, celui qui était toujours joyeux, celui qui était fort. « Je t’aime papa mais j’ai besoin de toi, le vrai toi, redeviens toi-même s’il te plait ». C’était une main tendue… C’était ça le déclic, ma petite fille me montrait le chemin et j’allais saisir cette chance !

Cette résilience était-elle un mal nécessaire ?

Je me serais bien passé de ces épreuves, franchement. Mais si on est patient, qu’on est vraiment déterminé à s’en sortir, je crois que nous sommes tous outillés pour surmonter tout ce que la vie nous impose. Le maître-mot, c’est la patience et moi qui n’en ait pas le moindre échantillon sur moi, des fois je me dis que c’est vrai cette histoire de cordonnier mal chaussé ! Je suis un coach en mieux-être qui va parfois mal, très mal, mais du coup, j’ai fabriqué les anticorps. Quand ça me tombe dessus, je sais comment réagir. Je crois aussi que nous devrions tous accepter notre vulnérabilité, que nous ne devrions pas être orgueilleux, ça ne donne jamais rien de bon de garder tout ça à l’intérieur.

Concrètement, comment t’y es-tu pris pour remonter la pente ? Avec quelle aide ?

J’ai commencé par aller voir un psy, c’est la base je crois. Ca m’a beaucoup aidé d’avoir un avis extérieur neutre, et de surtout reconnaître que j’avais un problème. J’ai d’ailleurs découvert qu’énormément de boxeurs et de cyclistes souffraient de ce mal. La dépression concerne de plus en plus de monde. J’ai presque envie de dire qu’il serait un peu fou de se faire croire qu’on va bien dans ce monde de fous ! Sans me chercher d’excuses, le sport de haut niveau ne nous laisse pas « intact ». Néanmoins, je savais confusément que ce serait le sport qui allait me tirer de là. J’ai demandé à un de mes meilleurs potes de m’aider. Je suis descendu à Nice rejoindre Greg Ibeknoussen dans sa salle Lelab pour reprendre le contrôle.

Quel programme as-tu suivi ?

Je me connais bien en ce qui concerne la nutrition et j’ai suivi les grands principes de Fitnext. C’est vraiment un super programme, de surcroît quand on a perdu les bons réflexes. Quand au sport, j’ai laissé Greg me prendre en charge, je lui ai confié les clés. J’y allais les yeux fermés, c’est un super coach. De février à juin, j’ai fait deux stages d’une semaine avec lui à Nice. Mon associé m’a soutenu, mon éditrice m’a soutenu et on a bossé dur sur mes deux nouveaux livres et sur Fitnext. Je me suis imposé un entraînement de 10 heures par semaine et un fond nutritionnel impeccable. Je faisais beaucoup de bodyweight et un peu de salle? Du vélo cinq jours par semaine. Le programme était: « décidé d’être heureux… » C’était ça mon mantra, et ça n’est pas venu en huit jours. Mais au bout de six semaines, j’ai senti que quelque chose avait changé, que j’allais pouvoir être bien à nouveau, serein, au-delà de tout ce qui pourrait m’être imposé. Et même si je trébuche, je me relèverai encore et encore…

Quel enseignement tires-tu de cette expérience ?

Que tout passe… Il faut se faire confiance, il y a toujours une phase incompréhensible de cicatrisation bien sûr, mais je crois qu’on se remet de tout. Et aussi qu’il faut se lancer dans des projets, rêver…

Côté business, où en est Fitnext, après huit année d’existence ? 

Nous sommes en passe de réussir le pari que nous avons fait il y a un an avec Cédric Girard, mon associé, celui de redresser Fitnext. Nous avons remis les fondamentaux de notre produit en place tout en développant une approche beaucoup plus centrée sur le client. Le programme Fitnext est d’autant plus efficace qu’il est plus facile à suivre et à intégrer dans son agenda. C’est bon de voir cette bande se battre et de sentir cette nouvelle dynamisme qui renforce l’esprit d’équipe.

La concurrence « sauvage » que se livrent des entreprises telles que « Comme J’aime », très offensive dans les médias, t’a-t-elle poussé à te repositionner plus vers l’alimentation ?

C’est vrai que la concurrence est féroce, on n’a plus le droit à l’erreur avec des concurrents aussi importants. Notre force est d’apprendre à nos coachés à mieux manger, pas à moins manger, en nous concentrant sur le microbiote, qui conditionne 70% de notre immunité. Nous proposons aussi de nouvelles fonctionnalités en l’accompagnant au restaurant et en lui donnant toujours les bons conseils où qu’il soit pour l’aider à optimiser sa progression. Par ailleurs, tu peux choisir des plats faciles à préparer ou choisir de vraiment cuisiner comme un chef, c’est ça aussi le nouveau Fitnext !

La notion de « mincir » semble aujourd’hui omniprésente dans les publicités et promotions autour des sites de coaching en ligne. Est-ce la raison numéro 1 pour laquelle les gens viennent vers Fitnext ?

C’est un peu normal que tu aies cette impression; en 2030, presque 30% de la population sera obèse en France. Ne cherche pas plus loin ! Tout le monde veut maigrir parce que les gens grossissement massivement. Et personne ne se demande ce qui est à l’origine de cette inflation ! C’est fou, non ? Pourtant les scientifiques nous ont expliqué que l’origine de ce mal était la quantité et la variété de bactéries dont nous disposons dans l’intestin. Ce microbiote se constitue entre le quatrième mois de grossesse et la quatrième année d’existence, c’est en quelque sorte notre carte d’identité bactérienne pour la vie. Durant cette période, il faut être très attentif et essayer d’être le moins possible exposé aux antibiotiques, aux pesticides, aux OGM. Bref, tout ce à quoi on est exposé aujourd’hui avec l’alimentation industrielle. Il suffit de boire du lait, de manger de la viande ou du poisson et vous connaissez les coupables. La plupart des éleveurs industriels administrent des antibiotiques pour prévenir les maladies, ils donnent aux animaux des céréales venues d’Amérique du Nord, c’est-à-dire des céréales OGM saturées de pesticides ! Ce sont aussi ceux qui sont à l’origine de l’épidémie d’antibiorésistance qui inquiète l’ONU.

Comment Fitnext prend cela en compte, et qu’est-ce que ton application a de plus que les autres ?

Pour nous, le bien-être est tout aussi important que la transformation physique. Contrairement à de nombreux régimes ou programmes sportifs, Fitnext a un apport complet sur la santé, l’énergie, le sommeil, la performance sportive et le moral. Nous aidons nos coachés à révéler ainsi le meilleur d’eux-mêmes. Notre force, c’est aussi un programme quotidien qui s’adapte en continu à nos coachés en fonction de leur ressenti, de leur progression, de leurs objectifs et envies et de leur agenda. Le but étant de déployer des solutions pragmatiques autour du coaché pour lui faciliter la vie.

Ton nouvel ouvrage, Les chances qu’il nous reste, histoire de la 6e extinction, sonne comme un cri d’alarme. Crois-tu vraiment en l’extinction de l’espèce humaine ?

J’adorerais qu’on se dise dans vingt ans: « Regarde ce que disait cet abruti de Menthéour, lui qui croyait en une possible fin du monde, il a vraiment eu tout faux ! » Vraiment, j’adorerais… Le problème depuis vingt-cinq ans est que tous les scénarios envisagés par le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, ndlr) avaient conçu une grille avec « worst case scenario » (scénario du pire, ndlr) ont été explosés par la réalité ! Par exemple, en 2000, ils avaient projeté que six ans plus tard, les rejets de dioxyde de carbone atteindraient au pire du pire 8 milliards de tonnes, or ils ont atteint 8,4 milliards de tonnes. Chaque fois, l’homme a trouvé des ressources pour faire encore pire que le pire des scénarios envisagés. Certains glaciologues ont été tétanisés par les découvertes qu’ils ont faites au Groenland au cours des dix-huit derniers mois. Jamais ils n’auraient imaginé être confrontés à cette réalité de leur vivant. Alors oui, je parle de sixième extinction et je l’assume mieux que n’importe quel scientifique car je peux me permettre de dire des conneries. C’est d’ailleurs le rôle du lanceur d’alerte. En conclusion, j’ai bien peur que ce soit la fin du monde qui se dessine si nous ne changeons pas les choses sous cinq ans. Si nous ne réduisons pas drastiquement notre production de gaz à effet de serre, nous allons être confronté à un effet domino dont aucun scientifique n’est en mesure de prévoir les conséquences à court, moyen et long terme, cela pourrait aller beaucoup plus vite que ce qu’on imagine et c’est ce qui préoccupe l’ONU et toute la communauté scientifique.

Tu te bats depuis des années pour cette prise de conscience. As-tu aujourd’hui le sentiment d’être écouté ? Pris au sérieux ?

Pris au sérieux ? Ce n’est pas le sujet, je pense. Je voudrais surtout être entendu. Que nous dit l’éminent glaciologue Peter Wadhams ? Il pense que le contexte climatique actuel en pleine mutation pourrait augmenter démesurément les émissions de méthane en cas de fonte du permafrost, qui aboutirait à un réchauffement quasi immédiat de 1°C, en quelques semaines. Et la réalité à laquelle nous confronterait la fonte de cette ancestrale couche de glace est que le méthane qu’elle recouvre pourrait ensuite faire monter la température de notre planète de plusieurs degrés, voire de plusieurs dizaines de degrés. C’est tout simplement de la fin de la vie sur terre dont nous parlons ici, c’est-a-dire de l’extinction de l’espère humaine avant 2100.

Le « temps politique », toujours très long, est-il compatible avec la prise de mesures radicales nécessaires à la survie de l’humanité telle que tu l’imagines ?

Je crois définitivement en notre capacité individuelle à bouger les choses. Prenons un exemple: si je vous avais demandé d’acheter bio en 1980 en vous expliquant que les pesticides détruisaient notre santé et notre environnement, vous m’auriez au moins pris pour un soixante-huitard attardé ou un altermondialiste de base. Résultat ? Tout le monde aujourd’hui a adopté le bio, même les industriels, pour le meilleur et pour le pire ! Nous devons être conscients que nous disposons d’une arme de construction massive dans la poche, nous avons une carte de crédit ! C’est mieux qu’un vote. En 1982, Coluche disait très justement « Quand on pense qu’il suffirait qu’on arrête de l’acheter pour ne plus que ça se vende… » C’est exactement ça ! C’est vraiment très puissant une carte de crédit, nous devons en prendre conscience. Par ailleurs, si je vous demande si vous voulez le changement, tout le monde est d’accord; si je vous demande si vous êtes prêts à changer, presque plus personne ne relève la tête et opine. Pourtant, sans changement, sans transition, c’est l’effondrement qui jour après jour se précise et prend forme. N’est-il pas temps pour nous tous de nos remettre en question individuellement ? N’est-il pas aussi temps d’imposer aux entreprises qui sont à l’origine du mal de reverser plus de la moitié de leurs bénéfices pour financer la transition écologique ? On les connaît, près d’une centaine d’entreprise ont produit 73% des gaz à effet de serre en moins de cent cinquante ans… Même les gouvernements les plus fainéants ou vendus sauraient faire ça pour sauver la planète et ses habitants…

Quel est le pont entre Fitnext et ce combat pour l’avenir ?

Fitnext est la mise en oeuvre des grands principes d’écoresponsabilité ! Sur la nouvelle application, nous accompagnons les gens pour arrêter la viande. Sur chaque recette, il y a trois indicateurs: le microbiote, l’équilibre acido-basique et l’éco-impact. Si bien que chaque fois qu’on cuisine, on peut mesurer ce qui est bon pour soit et en même temps bon pour la planète. Ce n’est pas anodin parce que cela accompagne le coaché vers la responsabilité. L’avenir de notre monde passe par une prise de conscience individuelle et Fitnext est un accélérateur de cette prise de conscience. C’est une grande fierté pour moi. Changer soi-même, c’est changer le monde !

Autoportrait d’un lanceur d’alerte

De Secret Défonce à Et si on arrêtait d’empoisonner nos enfants, je n’ai fait qu’une chose, en fait, une seule: lancer l’alerte. En montant mon entreprise de coaching alimentaire et sportif, Fitnext, j’ai très vite eu l’ambition d’aider les gens à prendre le pouvoir sur eux-mêmes, à reprendre le contrôle de leur chimie interne, de leur environnement alimentaire. Puis j’ai mesuré combien nos choix en termes de nutrition avaient des conséquences directes sur notre environnement. Et j’ai pu mesurer, comme d’autres, la gravité de la situation dans laquelle nous étions: je suis fasciné par l’ignorance volontaire et le déni dans lesquels nous sommes. Pour les climatosceptiques, encore beaucoup trop nombreux, sachez que les émissions liées à l’activité humaine ont fait grimper les niveaux de CO2 de plus de 40% en un siècle et demi. Même les conclusions du GIEC sont parfois dramatiquement optimistes. Cet optimisme nous menace, cet optimisme nous tue. Petite précision: entre le moment où nous produisons des gaz à effet de serre et le moment où nous réchauffons le climat, il se passe quarante ans. Autrement dit, les vagues de chaleur record que nous connaissons aujourd’hui sont dues aux changements de modes de vie et l’industrialisation de masse d’après-guerre, aux pratiques de consommation des années 50 de nos grands-parents. Elles sont devenues notre norme. Durant toute la première partie du XXè siècle, l’industrie du transport est la première responsable du réchauffement climatique – elle représente aujourd’hui 13% des gaz à effet de serre. Depuis quarante ans, c’est la viande (15%). Or avec la mondialisation, l’ONU prévoit une augmentation de 78% de la consommation de boeuf, ce qui propulserait à 45% les émissions des gaz à effet de serre. Tous les quatre jours, 10 millions de personnes naissent sur cette planète. Pour une personne qui se tourne vers le végétarisme, neuf se tournent vers la viande alors qu’ils viennent de pays émergents historiquement végétariens. N’ayons pas peur des mots. Nous courons vers le chaos. Avec Les chances qu’il nous reste, que je rêve offensif et enthousiaste, j’aimerais inviter tout le monde, avec force et optimisme, à la prise de conscience et au combat. Parce qu’il est aujourd’hui crucial de sortir du déni, de l’ignorance volontaire dans laquelle notre société, l’Histoire, la torpeur abstraite de la finance mondialisée nous ont plongés. Notre siècle encore neuf peut devenir celui d’une révolte inédite. Nous avons les moyens de nous mobiliser, de choisir de ne pas abdiquer et, surtout, de ne pas continuer de collaborer à notre perte. J’aimerais montrer ce qu’on peut faire, très concrètement, pour renverser le cours tragique des choses dans lequel nous serons sinon saisis, comme les habitants de Pompéi, dans la lave et le feu des catastrophes. Chacun d’entre nous doit redécouvrir, individuellement, sa puissance intime, rebelle, son humanité dans ce qu’elle a de singuliers, nous redevenons dangereux. Nous ne serons plus prévisibles. « We can be heroes », disait David Bowie ? Ca tombe bien il s’agit de sauver le monde. Alors, allons-y !