Plein le dos ! – Coach Magazine France

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Près de 80% des Français en souffrent. On l’a d’ailleurs longtemps considéré comme « le mal du siècle ». Pourtant, le mal de dos n’est pas nécessairement une fatalité. Le point sur la question.

Quelque soit l’endroit où il se situe, le mal de dos est insidieux et handicapant. La douleur plus ou moins sourde rend les gestes du quotidien difficiles et nuit à la qualité de la vie. Car le dos n’est pas un élément accessoire de l’anatomie humaine. Il permet les mouvements de torsion et de flexion, veille à la mobilité de l’ensemble du squelette, assure le soutien du buste, etc. Au coeur du mécanisme, le rachis (plus communément appelé « colonne vertébrale »), composé de ses 24 vertèbres (7 cervicales, 12 dorsales, 5 lombaires) séparées par des disques intervertébraux.

Pourtant, la colonne vertébrale n’a pas seulement un rôle mécanique, elle assure aussi un rôle protecteur puisqu’elle renferme la moelle épinière. Un réseau complexe de tendons, nerfs et muscles vient ensuite se greffer sur le rachis pour assurer la solidité de l’ensemble et permettre les mouvements.

Au final, le dos est, vu de l’extérieur, un extraordinaire mécanisme de précision. C’est aussi ce qui peut faire sa faiblesse. Une musculature un peu faible, un « tassement » vertébral, un problème articulaire, des douleurs posttraumatiques… les origines des douleurs au niveau du dos sont aussi nombreuses que difficiles à trouver. D’autant que les causes et les situations qui génèrent les douleurs peuvent aussi être variées : faux mouvement, travaux physiques, traumatisme… Pire, des éléments apparemment sans lien et extérieurs comme le stress peuvent se révéler désastreux pour notre dos. Mais la cause principale du mal de dos n’est peut-être pas celle à laquelle on aurait pensé en premier lieu !

Du sport pour moins souffrir du dos

La sédentarité ! C’est aujourd’hui la cause la plus couramment identifiée en cas de mal de dos. Voilà qui remet largement en balance les « mauvaises » habitudes des Français, plus enclins à ne plus bouger du tout quand ils ont mal au dos, voire à ne pas bouger a priori, car ils pourraient avoir mal au dos ! C’est même devenu un enjeu de santé publique, puisqu’un document consacré au mal de dos édité par l’Inpes, l’Assurance maladie et le ministère de la Santé nous rappelle que « de nos jours, la sédentarité est à l’origine de la plupart des maux du dos, car elle entraîne un affaiblissement des muscles en général, et de ceux qui maintiennent le dos en particulier.

La plupart du temps, les douleurs de dos proviennent des muscles, ligaments et articulations du dos qui ne sont plus assez habitués à bouger et qui se “fatiguent” donc rapidement ». Or, pour se muscler, dos compris, nous sommes bien d’accord sur le fait que le sport n’a pas son pareil. C’est aussi l’exercice physique qui permet d’acquérir une meilleure mobilité et une meilleure souplesse, et un meilleur équilibre aussi, trois des clés d’un physique qui respire la santé. « La pratique d’une activité physique régulière contribue à une meilleure récupération et à un plus grand bien-être pour ceux qui souffrent du dos », conclut ainsi le document du ministère de la Santé. D’accord. Mais quel sport ? Jusqu’à il n’y a pas si longtemps, mal de dos et course à pied semblaient, de l’opinion générale (médecins compris), incompatibles. Vous avez
mal au dos ? Eh bien, raccrochez les baskets !

La course à pied « trop traumatisante », générant trop d’impacts, était même parfois placée sur le banc des accusés. On lui préférait des sports « portés », comme le vélo ou la natation, supposés moins traumatisants pour le dos. Aujourd’hui, on est largement revenu sur cette idée reçue, comme l’explique notre expert, le docteur David Popesco : « La lombalgie est le mal du siècle. Alors que les médecins du travail empêchaient certains travailleurs de revenir à des postes considérés comme responsables de leurs problèmes de santé, on s’aperçoit actuellement qu’une activité physique, même contraignante pour la colonne, est moins délétère que le travail de bureau, au cours duquel les disques intervertébraux se déshydratent et s’affaissent. Il en est de même pour les sports asymétriques (tennis, golf, par exemple) et pour la course à pied, qui pourraient contribuer à améliorer la symptomatologie des lombalgies. »

Savoir s’arrêter pour mieux repartir

Pour autant, ce n’est pas parce que mal de dos et course à pied ne sont pas incompatibles sur le papier qu’il faut se forcer ou faire fi des signaux envoyés par notre organisme. Un mal de dos n’est jamais anodin et il ne va pas disparaître comme par enchantement, course ou pas. Il est évident que, quand la douleur rend la moindre foulée impossible, il n’y a pas d’autres options que d’arrêter… et de consulter.

Selim, 49 ans, souffre de lombalgies à répétition. Des douleurs de plus en plus accrues qui lui gâchent la vie et l’amènent à consulter. « J’étais complètement bloqué du dos. Mon médecin a diagnostiqué une arthrose bien avancée et m’a conseillé d’arrêter de courir. » De toute façon, il lui aurait été bien difficile de chausser les baskets dans ces conditions et de continuer ses trois entraînements par semaine! Par ailleurs, seule une consultation médicale poussée permettra au médecin d’identifier l’origine des douleurs, de poser un diagnostic et… de traiter.

Des examens complémentaires seront peut-être nécessaires, tout comme un passage chez le kinésithérapeute, l’ostéopathe et/ou le podologue. À ce stade, il s’agit surtout de soulager, mais aussi d’identifier le problème pour le régler sur le fond. En parallèle, il peut être vivement conseillé de travailler sa musculature dorsale et abdominale via des exercices ciblés et en intégrant à sa routine d’entraînement quelques séances de gainage ou de core training (voir Runner’s World n° 44).

Il n’est pas inutile non plus de travailler la souplesse du dos, là encore par le biais d’exercices ciblés. Enfin, aux traitements allopathiques, aux séances de manipulation (chez un kiné ou un ostéopathe) et de musculation s’ajoute une remise en forme plus globale (hygiène de vie, sommeil, gestion du stress…), mais aussi un changement d’habitudes quand celles-ci sont directement responsables des douleurs. Ce peut être une literie à changer, une position en voiture à améliorer pour celles et ceux qui font beaucoup de route, un geste à modifier (si on porte régulièrement des cartons, par exemple), etc. Votre médecin (ou votre kiné) sera votre principal allié pour déceler ce qui dans votre comportement (au travail, dans les loisirs, à la maison) peut induire lombalgies, cervicalgies et autres douleurs au niveau du dos.

Quant à la course, elle peut tout à fait être reprise dans de meilleures conditions (sauf avis médical contraire, bien entendu) une fois que les douleurs ne la rendent plus impossible. Mais, là aussi, il faut adopter de bonnes attitudes. Un mauvais chaussage, un terrain trop dur ou un entraînement mal conduit (sans échauffement ni retour au calme, par exemple) peuvent générer tensions dorsales et douleurs. Même vous n’avez encore jamais souffert du dos, adopter de bonnes habitudes de course peut prévenir des douleurs futures. « On peut courir plusieurs mois avec une chaussure inadaptée et avoir des douleurs bien après, le temps que les structures soient lésées », explique ainsi Mickaël Bregmestre, pédicure et podologue du sport. Après avoir consulté ostéopathe et kiné, Selim a pu reprendre la course. Mais il a aussi vu un podologue pour un problème de pieds pronateurs qui était passé jusque-là inaperçu.

Le point avec notre expert David Popesco, médecin du sport

Les coureurs sont-ils plus sujets aux problèmes de dos ? Pourquoi ? Non, ils le sont a priori moins que la population générale. L’explication vient de la physiologie de la colonne vertébrale, plus particulièrement de celle

du disque intervertébral. On pensait auparavant que les lombalgies venaient uniquement des contraintes imposées au disque. Celui-ci se fendait et laissait passer des fragments de noyau discal (protrusion) ou le noyau entier (hernie discale), ce qui comprimait une racine nerveuse, d’où la douleur. On contre-indiquait tout sport sollicitant pour la colonne vertébrale, dont la course à pied.

Les travaux récents ont montré que la déshydratation du disque intervertébral, qui survient avec le temps, intervenait énormément également. Les mouvements que la course à pied impose à la colonne transforment un peu les disques en éponges, écrasés entre deux vertèbres, qui une fois comprimés se détendent pour « aspirer » l’eau et se réhydrater. Par ailleurs, la musculation de la sangle abdominale, des muscles latéraux pariétaux et paravertébraux que provoque la course à pied aide à maintenir une posture de qualité et limite les mouvements de cisaillement de la colonne vertébrale.
Enfin, il faut savoir que le disque intervertébral est un corps étranger pour l’organisme : dans sa situation normale, il ne se passe rien. Dès qu’une pathologie le sort de son emplacement anatomique, il se produit une réaction inflammatoire qui tend à vouloir le digérer. C’est ce qui provoque la douleur de la lombalgie. C’est ainsi que 80 % des lombalgies disparaissent spontanément avec le temps.

Quelles sont les pathologies du dos les plus courantes chez les coureurs ?
Avant tout celle de la dégénérescence discale, commune à toute personne dans le temps. Elle peut aller jusqu’à la hernie discale. Viennent les anomalies de posture, de statique de la colonne, dues à une contrainte trop importante (entraînement excessif, surpoids, chaussures non adaptées, activité préférentiellement pratiquée sur sol dur, bitumeux). Les tassements vertébraux surviennent avec l’âge. Mais un coureur régulier est plus protégé qu’un sédentaire, car les sollicitations imposées aux os les rendent moins fragiles. Enfin, accessoirement, les pathologies rares, tumorales, bénignes ou malignes.

Une mauvaise posture pendant la course peut-elle entraîner un mal de dos ? Oui, par déséquilibre des chaînes musculaires postérieures, ou antérieures postérieures. Des contractures des muscles vertébraux peuvent survenir,

au même titre qu’une contracture du mollet.

Quand faut-il arrêter l’entraînement ?
Lorsque la douleur ne permet plus de courir, lorsque l’on présente des troubles neurologiques, fourmillements, paralysie, douleurs franches de sciatique. Par ailleurs, il ne faut pas se dire que l’amélioration de la douleur sous traitement permet de reprendre le sport. Ce camouflage ne signe pas la guérison.

Quels sont les bons gestes en prévention ? Des chaussures adaptées – éventuellement équipées de semelles orthopédiques spécifiques –, un entraînement progressif, tant en volume

qu’en intensité, la variété des terrains d’entraînement, la limitation de la position assise (la pire pour les lombalgies), une activité physique régulière (trois sorties hebdomadaires en course à pied, par exemple) ou deux à trois séances de gainage hebdomadaire.

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